Les Cahiers de Science & Vie No. 204

Deux symboles forts, inéluctablement liés l’un à l’autre. Forcément! La puissance de l’un nourrissant celle de l’autre, et vice versa bien sûr. La ville capitale assoit son monarque et celui-ci lui redonne tout son éclat. Une bien belle histoire qui, comme souvent, finira mal, d’autant plus quand il est question de prestige et de pouvoir. Avant de faire rouler la tête de Louis XVI au pied de l’échafaud, le peuple de Paris a bâti, embelli, subi et accepté les désirs de ce pouvoir absolu qui faisait la France. Sans oublier toutefois de se rappeler à son bon souvenir à coups d’émeutes et de révoltes ponctuelles. C’est cette histoire d’amour contrariée – elles le sont souvent – entre deux pouvoirs tenus de coexister et de se nourrir l’un l’autre que nous…

Non, Paris ne s’est pas toujours appelé Paris. Tous les écoliers de France le savent: avant de porter ce nom, elle fut d’abord Lutetia, un titre peu flatteur qui signifie littéralement en latin « le lieu où il y a de la boue». C’est Jules César qui, le premier, mentionne dans La Guerre des Gaules cet oppidum de la tribu des Parisii, qu’il situe sur une « île de la Seine », sans plus de précision. Il connaît le site, puisqu’il s’y rend en 53 av. J.-C. pour assister à l’assemblée des peuples gaulois. Et l’année suivante, il y envoie l’un de ses lieutenants mater les troupes ennemies. « Les historiens ont longtemps pensé, à tort, que le général faisait référence à l’actuelle île de la Cité, expliquait l’historien de…

«En 511, Clovis Ier mourut à Paris et fut enseveli dans la basilique des Saints-Apôtres, qu’il avait lui-même fait construire avec la reine Clotilde. Là même où sainte Geneviève avait été inhumée en 502 par la volonté du roi ». C’est ainsi que s’achève le livre II de l’Histoire des Francs de Grégoire de Tours (538-594)… Le hic, c’est qu’on n’a jamais retrouvé le tombeau de Clovis, ni celui de son épouse Clotilde, tous deux enterrés aux côtés de la sainte dans ce qui devint au Moyen Âge l’abbaye Sainte-Geneviève. Ont-ils disparu au cours des raids normands, qui ravagèrent l’abbaye au IXe siècle ou lors de ses travaux de reconstruction, au XIe siècle? Toujours est-il qu’en 1807, l’abbaye tombée en ruine au fil des siècles est définitivement démolie pour percer…

Vers le milieu du IIIe siècle, un certain Denis est dépêché par le pape pour évangéliser la Gaule païenne. Avec ses deux compères Éleuthère et Rustique, le premier évêque de Lutèce convertit les foules avec un certain succès, suffisamment en tout cas pour irriter les autorités romaines qui finissent par décapiter les trois hommes sur la butte Montmartre (Mons Martyrum, le mont des Martyrs). Les corps sont enterrés à 6 km de la ville, dans un cimetière gallo-romain nommé Vicus Catulliacus. C’est là que se dresse aujourd’hui la basilique Saint-Denis, berceau du gothique et tombeau des rois de France. Par quel prodige la sépulture de ce saint modeste, sans grand miracle à son actif, a-t-elle exalté les souverains au point de se faire inhumer à ses côtés pendant plus d’un…

Àl’origine, une « montjoie » est un tas de cailloux que les voyageurs de l’Antiquité accumulaient en l’honneur de Mercure, le dieu de la route, pour marquer le chemin. Ils devinrent peu à peu des oratoires d’où les pèlerins criaient leur joie à la vue du but de leurs pérégrinations. On dit qu’à l’époque de Suger furent construits les « montjoies de Saint-Denis », des petits monuments avec une statue de roi surmontés d’une croix qui reliaient par un chemin sacralisé l’abbaye à la capitale. Le nom de montjoie fut repris pour désigner l’oriflamme de Saint-Denis, une bannière de couleur rouge parsemée de flammes d’or, que les rois venaient recueillir en temps de guerre des mains de l’abbé pour se placer sous la protection du saint. « Montjoie Saint-Denis! »…

Ce 22 février 1358, une meute de Parisiens ivres de rage vient d’acculer l’avocat Regnault d’Acy dans une pâtisserie aux portes du palais de la Cité et l’a saigné comme un goret. Le malheureux venait de rendre compte au Dauphin des terribles conditions du traité de Londres qui cède à l’Angleterre l’ensemble de ses anciennes possessions d’Aquitaine ainsi qu’une rançon de 4 millions d’écus. Aiguillonnée par le prévôt des marchands Étienne Marcel, la foule déchaînée force les portes du palais et fait irruption dans la chambre même du Dauphin. Deux de ses maréchaux qui s’interposent pour le protéger sont passés au fil de l’épée et tombent au pied de l’héritier du trône qui ne doit son salut qu’à son consentement de porter le chaperon bleu et rouge aux couleurs de…